Tuesday, January 5, 2021

Le massacre à la cour de Mashira et le climat de suspicion permanent entre les Hutu et les Tutsi du Rwanda

Carte: Royaumes du Rwanda Ancien


Par François Munyabagisha
Le 5 Janvier 2021

Dans son recent livre intitulé "Rwanda: les virages ratés", pp.34-35, le génie historien Rwandais, Ferdinand Nahimana, fait lire ceci:

[...] Mibambwe Mutabazi a utilisé ses relations matrimoniales avec la lignée régnante du clan des Ababanda pour conquérir le royaume du Nduga. À ce sujet, Alexis Kagame (1972, pp.79-80) a écrit:

"Tandis qu'il entreprenait son voyage de retour au pays, Mibambwe I dépêcha des messagers vers Mashira, monarque du Nduga, son gendre. Il lui demandait l'hospitalité et le libre passage à travers le Nduga. Mashira avait sa résidence au sommet de Rwesero; et il tint à fêter son beau père en la capitale même du Nduga. Mibambwe I y fut donc invité et il trouva un logement préparé à son intention à Nyamagana, dans les abords immédiats de Nyanza [non loin du palais de Mashira. Tandis que Mashira s'affairait dans l'arrangement des festivités, il fut arrêté à l'improviste, avec tous ses enfants mâles. Ils furent traîtreusement massacrés, ce qui mettait fin à la lignée régnante des Ababanda."

Le massacre à la cour de Mashira fut suivi par d'autres à travers le royaume du Nduga. Mibambwe et ses hommes s'employèrent à supprimer toute personne ayant eu quelque rôle dans la gestion du pouvoir. La répression fut dure et longue; elle créa chez les habitants du Nduga conquis un profond ressentiment contre les nouveaux conquérants tutsi et une grande méfiance du Hutu envers le Tutsi, surtout envers le sommet de la hiérarchie politique et administrative.

Depuis cette époque, certainement à cause de l'importance de Mashira évincé par perfidie, et à cause de sa crédulité dans ses relations avec ceux qui ont été finalement ses tueurs, attitude que ces derniers ont qualifiée de naïve, il existe chez le peuple rwandais un climat de suspicion permanent entre les Hutu et les Tutsi. Le Hutu a peine à croire à l'existence de sincérité chez le Tutsi. Quand le Tutsi l'approche pour n'importe quelle affaire, il est toujours réticent car il pense qu'il veut lui tendre un piège. De son côté, le Tutsi considère le Hutu comme naïf, trop attaché au respect du pacte conclu dans le domaine du mariage ou de l'amitié, peu regardant et rarement calculateur. [...]

Ce récit ainsi que d’autres monstruosités de la monarchie tutsie au Rwanda ne serait-il pas en mirroir avec les tragédies en cours au Rwanda depuis 1994?

SI LA REPONSE A CETTE QUESTION DEVAIT ETRE AFFIRMATIVE, QUELLE LUMIERE EN TIRER ET QUELLE MEDICATION?

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Rwanda: les virages ratés
Par Ferdinand Nahimana
Préface de Helmut Strizek, 
Collection: Le droit à la parole

L'auteur de l'ouvrage inventorie et analyse les occasions manquées de dialogue et de prise de décisions importantes utiles, éclairées et concertées garantissant à l'homme tous ses droits dans la société. Il dresse le tableau des causes profondes du drame "rwandais" parmi lesquelles on retrouve notamment le refus de l'autre et le mépris d'autrui, déclencheurs de conflits et de malheurs.

Il met en relief les multiples opportunités que le peuple rwandais n'a pas saisies pour cimenter son unité et éviter le cycle de la violence qui a finalement abouti aux massacres massifs de 1994 qualifiés de génocide par l'ONU. Les événements qui ont conduit à cette hécatombe ne sont pas soudainement tombés du ciel ni subitement sortis de l'enfer. Ils sont le résultat d'un long processus que beaucoup d'analystes taisent volontairement ou par méconnaissance. Il analyse de nombreux faits et gestes d'acteurs sociaux, politiques et militaires rwandais et étrangers dans les deux dernières décennies du 20ème siècle qui constituent un dernier précipitant. Cet ensemble permet de comprendre comment le Rwanda s'est projeté sous les feux de l'actualité depuis 1994.

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