Par Gaspard Musabyimana
03/06/2014 |
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Au
Rwanda le journal pro-gouvernemental « igihe.com » dans son
édition du 02 juin 2014 rapporte que 16.000 personnes ont disparu de la
région de Ngororero (Gisenyi-Nord du pays). Come le apporte le journal, les
autorités locales et le ministre de l’Intérieur, James Musoni, minimise la
situation, se contentant d’affirmer que ces personnes sont parties dans
d’autres régions du pays à la recherche des terres ou qu’elles auraient
rejoint les FDRL (Forces de Libérations du Rwanda) en République Démocratique
du Congo (RDC).
Le
nombre de 16.000 personnes est impressionnant. Il est impossible qu’un
mouvement aussi massif de populations passe inaperçu dans une région donnée
du Rwanda. En effet, le territoire rwandais est quadrillé par des militaires.
Ils sont éparpillés par petits groupes sur bon nombre de collines du pays.
Ils sont secondés par les membres de la défense locale (LDF: Local Defense
Force), une milice chargée d’encadrer la population par tranches de 10
ménages.
Il
y a également la tentaculaire DMI (renseignements militaires). Ses agents
sont infiltrés partout notamment dans le Nord du pays où l’on craint des
infiltrations des combattants des FDRL. L’avènement des « Intore » (les élus,
les meilleurs) est une autre trouvaille du FPR pour surveiller la population.
Il s’agit des personnes choisies et qui passent de maison à maison pour
vérifier si leurs occupants sont affiliés au parti FPR, au pouvoir. Au niveau
communal, il y a les « abakada » (cadres), et la police communale.
Le
citoyen est tenu donc quotidiennement à l’œil par ces structures qui ne lui
laissent pas la liberté de mouvement. Même une simple visite familiale est
assujettie aux formalités administratives: le visiteur doit aller d’abord se
faire enregistrer auprès de l’autorité sitôt arrivé dans une localité.
Dans
ces conditions, il est clair que ces personnes ont été victimes de «
disparitions forcées », c’est-à-dire qu’elles ont été arrêtées ou enlevées
par ces milices et ces militaires qui sillonnent les collines en repérant
leurs cibles. Ces personnes sont détenues dans des endroits secrets de façon
que nul sait ce qu’elles sont devenues. Il est évident que cela se fait avec
l’acquiescement des hautes autorités du pays car 16000 personnes, c’est toute
une région qui a été quasi littéralement vidée de ses habitants.
Les
disparitions forcées sont monnaie courante ces derniers temps au Nord du
pays. Dans son communiqué du 16 mai 2014, Human
Right Watch parle d’un nombre croissant de personnes qui ont été
victimes de disparitions forcées ou qui ont été officiellement portées
disparues au Rwanda depuis mars 2014. Cette organisation précise qu’un grand
nombre de cas sont survenus dans le district de Rubavu, dans la province de
l'Ouest. HRW a reçu des informations selon lesquelles certaines victimes de
disparitions forcées ont été appréhendées par des militaires de l’armée
rwandaise et autres milices qui infestent la région.
Ces
disparitions massives dans la région nord du Rwanda sont juridiquement des
disparitions forcées selon la définition de HRW, car ces personnes sont
privées de leur « liberté par des agents de l'État ou par des personnes
agissant avec son consentement, suivi d'un refus de reconnaître la privation
de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ».
Il
est à rappeler, à l’attention des autorités rwandaises concernées, qu’une
disparition forcée est un crime contre l'humanité selon les lois
internationales.
Rwanda : Vague de disparitions forcées |
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