Tuesday, September 24, 2013

Canada: Demande d’interdiction de séjour du président rwandais Paul Kagame au Canada

Le 19 septembre 2013

Honorable John Baird
Ministre des Affaires étrangères
2249 Carling Avenue
Suite 418
Ottawa (Ontario) 
K2B 7E9

Honorable Steven Blaney
Ministre de la sécurité publique
269, avenue Laurier Ouest Ottawa (Ontario)
K1A 0P8

Honorable Chris Alexander
Ministre de la citoyenneté et de l’immigration
100 Westney Road South, Unit E101
Ajax (Ontario)
L1S 7H3

Objet: Demande d’interdiction de séjour du président rwandais Paul Kagame au Canada
Honorables messieurs les Ministres
Les 22 Août 2013, nous vous avons envoyé une lettre concernant une visite que le président du Rwanda, le Général Paul Kagame, envisageait d’effectuer au Canada. Les informations qui étaient disponibles à ce moment indiquaient que cette visite devait avoir lieu entre le 29 août et le 2 septembre 2013 lors des cérémonies appelées « Rwanda Week ». Ces dernières ont finalement été annulées et le Haut commissariat du Rwanda au Canada a émis l’annonce ci-jointe selon laquelle le président Paul Kagame va plutôt être au Canada lors des cérémonies appelées « Rwanda Day 2013» qui se tiendront à Toronto du 27 septembre au 28 septembre 2013.
Par la présente, nous réitérons notre demande de ne pas permettre au président Kagame d’entrer sur le territoire canadien étant donné les accusations de crimes contre l’humanité qui pèsent sur lui, ses discours de nature à susciter la haine et la violence ainsi que d’autres graves violations des droits de la personne dont son régime est responsable.
Nous vous soumettons, une fois de plus, les quelques éléments ci-après qui montrent que le séjour du président Paul Kagame au Canada serait non seulement néfaste pour l’image du Canada, mais aussi pourrait perturber la paix sociale des ressortissants du Rwanda et d’autres pays de la région des Grands Lacs africains installés au Canada :
1. Les rapports d’experts des Nations Unies attestent que le Rwanda soutient en hommes, armes et munitions les rebelles congolais du M23 qui sévissent dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC). Ces rebelles sont responsables de crimes contre l’humanité, de multiples viols ainsi que des enrôlements forcés de jeunes enfants. Étant donné la co-responsabilité de l’armée du président Paul Kagame dans ces crimes, beaucoup de pays donataires, tel que la Grande Bretagne, les États-Unis, l’Allemagne et les Pays Bas ont considérablement réduit l’aide qu’ils accordaient au Rwanda.
2. Le rapport des Nations Unies Projet Mapping concernant les violations les plus graves des droits humains commises entre 1993 et 2003 sur le territoire de la République Démocratique du Congo impute à l’Armée Patriotique Rwandaise sous le commandement du Général Kagame de graves violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international. Il affirme que les crimes qui ont été commis pendant la période couverte sur les populations congolaises ainsi que des réfugiés hutus rwandais peuvent être qualifiés de génocide, si des éléments de preuve étaient apportés devant un tribunal compétent. Le gouvernement canadien est parfaitement au courant de cette situation parce que le Canada a accueilli beaucoup de rwandais et de congolais rescapés de ces horribles crimes.
3. Comme ne cessent de le dénoncer des grandes organisations de défense des droits de la personne et de liberté d’expression tel que Human Rights Watch, Amnesty International et Reporters sans Frontières, le régime de Kigali persécute quotidiennement, emprisonne et même tue ses opposants politiques et les journalistes indépendants. À titre illustratif, il y a lieu de citer le cas de l’ancien vice-président du Parti Vert, M. André Kagwa Rwisereka, qui est mort décapité un mois avant les élections présidentielles d’août 2010, l’assassinat du journaliste Jean Léonard Rugambage ainsi que l’emprisonnement de Mme Victoire Ingabire Umuhoza, M. Déogratias Mushayidi et Me Bernard Ntaganda, respectivement présidents des partis FDU-Inkingi, PDP-Imanzi et PS-Imberakuri, ainsi que de beaucoup d’autres opposants.
Le régime de Kigali envoie même à l’étranger des escadrons pour assassiner les opposants et les journalistes indépendants qui l’ont fui. À ce niveau, il y a lieu de citer notamment l’assassinat en Ouganda du journaliste Charles Ingabire, la tentative d’assassinat en Afrique du Sud du Général Kayumba Nyamwasa ainsi que celle de M. Jonathan Musonera et M. René Mugenzi en Grande Bretange.
Certains des escadrons qui commettent les crimes sur des personnes que le régime de Kigali considère comme ses opposants s’introduiraient dans divers pays à la faveur des visites du Président Kagame qui les amènerait comme membres de sa délégation. Cette situation risque de se produire au Canada advenant que les services des ministères placés sous vos responsabilités lui permettent d’y entrer.
4. Le président Kagame ne cesse de s’illustrer par des discours incendiaires susceptibles de replonger le Rwanda dans des violences à grande échelle. Ainsi, en date du 30 juin 2013 devant près d’un millier de jeunes rwandais réunis au sommet du Youth Connekt dialogue, il a déclaré que tous les hutu doivent porter collectivement l’opprobre du génocide des tutsi de 1994 et s’excuser, parce que ce sont leurs congénères qui ont tué des tutsi dans cette tragédie. À la même occasion, il a déclaré qu’il assassinerait lui-même quiconque prétendrait tuer en son nom.
Ces déclarations du président Kagame sont dangereuses à plusieurs égards et ont été dénoncées par plusieurs organisations politiques rwandaises et de la société civile dont l’association IBUKA qui regroupe des rescapés du génocide des tutsi de 1994. D’abord, le fait d’imputer la responsabilité du génocide de 1994 à tous les hutu, même ceux qui n’étaient pas encore nés en 1994 et ceux qui ont protégé leurs voisins tutsi, viole le principe de responsabilité individuelle qui constitue un des piliers des règles de droit. Ensuite, l’histoire montre que la plupart des grandes tragédies commencent par la présentation des personnes issues d’un certain groupe comme des êtres collectivement mauvais ou inférieurs. Enfin, le fait pour un chef d’État de promouvoir publiquement le règlement des différents par des assassinats plutôt que devant les tribunaux constitue le comble d’incitation à la violence au sein d’une population.
5. Le président Kagame a révélé publiquement ses intentions d’assassiner le président de la Tanzanie et ainsi perturber davantage la paix dans la région des Grands Lacs africains. Dans le même discours du 30 juin 2013 ci-haut mentionné, il a promis d’attenter à la vie de son excellence Jakaya Mrisho Kikwete, dans ces termes sans équivoque : «I will just wait for you at the right place and I will hit you ».
Le geste qui a valu au président Tanzanien de telles graves menaces de la part du président Kagame est d’avoir proposé, à l’occasion du 21ième sommet de l’Union Africaine du 26 mai 2013 à Addis-Abeba, la tenue de négociations générales de tous les acteurs impliqués dans la guerre au Congo. Il a déclaré que, si Kinshasa négocie avec ses adversaires du M23, il faut aussi que Kigali et Kampala engagent un dialogue avec les rebelles opposés à leurs régimes.
Honorables messieurs les Ministres, le Canada interdit d’entrer sur son territoire et expulse régulièrement des personnes soupçonnées d’avoir commis des crimes de génocide, des crimes de guerre, des contre l’humanité ou d’avoir prononcé des discours d’incitation à la haine et à la violence. Ces quelques éléments montrent clairement que le président Paul Kagame tombe dans la catégorie de ces personnes qui ne doivent pas séjourner sur le territoire canadien.
Les organisations signataires de la présente lettre vous demandent de ne pas autoriser au président Paul Kagame d’entrer sur le territoire Canadien. Le Canada ne gagne rien à accueillir sur son territoire une personne qui n’a aucun respect pour la vie humaine et qui prône la haine et la violence, fut-ce même un chef d’État. De même, les canadiens d’origine rwandaise ainsi que d’autres pays de la région des Grands Lacs africains ont embrassé les valeurs de respect des droits de la personne, de paix ainsi que de primauté du droit qui sont chères au Canada. Ils n’ont pas besoin de discours d’une personne qui prône le contraire de ces valeurs et qui de surcroît, risque de porter atteinte à leur sécurité.
Pour le parti Amahoro Congrès du Peuple 
Etienne Masozera, Président

Pour RNC-Section Canada
Emmanuel Hakizimana, Ph.D., Coordinateur
23, rue de la Terrasse Eardley 5, 5e avenue, Laval, Qc
Gatineau, Québec, J9H 6B5 H7H 2H9
Tél. (613) 302-1256 Tél. (514)777-4809

C.C.
Directeur général de la GRC Immeuble QG 73 promenade Leikin Ottawa, (Ontario) K1A 0R2

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