La paix dans la région des grands lacs passe par l’arrestation et le jugement du président rwandais actuel, le général Paul Kagame. Par Jean-Marie Vianney Ndagijimana*
Le Conseil de Sécurité de l’ONU devrait adopter une résolution portant création du Tribunal international préconisé par le Rapport Mapping du HCDH sur les crimes de masse commis en RD Congo entre 1993 et 2003.
Au moment où la France vient de prendre la présidence du Conseil de sécurité de l’ONU, il nous apparait important de signaler la situation d’abandon et de profond désarroi dans laquelle vivent les citoyens rwandais et congolais victimes des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des actes de génocide commis dans la région des grands lacs africains depuis 1990.
Les espoirs nés au lendemain de la publication, le 1er octobre 2010, du Rapport Mapping du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) dénonçant ces crimes se sont évanouis comme peau de chagrin. Deux ans après la sortie dudit rapport, aucune initiative sérieuse n’a été prise par le Conseil de Sécurité de l’ONU pour donner suite à ses préconisations.
Les espoirs nés au lendemain de la publication, le 1er octobre 2010, du Rapport Mapping du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) dénonçant ces crimes se sont évanouis comme peau de chagrin. Deux ans après la sortie dudit rapport, aucune initiative sérieuse n’a été prise par le Conseil de Sécurité de l’ONU pour donner suite à ses préconisations.
L’inaction scandaleuse, la complaisance coupable et le manque de volonté politique des puissances membres du Conseil de Sécurité ont conduit les rescapés de ces massacres et les parents des victimes à remettre sérieusement en question la neutralité et l’utilité de cet organe des Nations Unies.
Cette inquiétude est d’autant plus justifiée que de sources variées proches des chancelleries occidentales auprès des Nations Unies, à Genève comme à New York, nous apprenons que les autorités rwandaises et leurs alliés extérieurs continuent d’exercer de fortes pressions diplomatiques sur les membres du Conseil de sécurité pour empêcher l’adoption de toute résolution sur le rapport Mapping.
Des organisations internationales non gouvernementales telles que Human Rights Watch
Amnesty International, Reporters sans frontières, la FIDH, les associations rwandaises et congolaises des rescapés et de défense des droits humains ainsi que plusieurs personnalités mondiales autorisées ont pourtant soutenu publiquement, à plusieurs reprises, la création d’une telle juridiction et souhaité que le Conseil de sécurité s’en saisisse dans les meilleurs délais.
L’absence d’action du Conseil de Sécurité est perçue par le régime de Kigali comme un encouragement à la récidive. C’est ainsi que fort du soutien complaisant d’une certaine communauté internationale, Paul Kagame a, depuis le début de cette année, ordonné l’infiltration des troupes d’élite rwandaises en République Démocratique du Congo. Les hommes du FPR se battent aux côtés de leurs suppôts locaux du M23 ex-CNDP, pillant les ressources minières, violant les femmes et massacrant les populations congolaises et les réfugiés rwandais.
Il est ainsi clair que le blanc-seing accordé à Monsieur Kagame depuis deux décennies demeure la principale cause de son arrogance et de ses visées hégémoniques criminelles. Tant que ce prédateur sanguinaire se sentira protégé, autorisé, voire encouragé à tuer et à massacrer les populations de nos pays en toute impunité, le sang continuera de couler dans l’indifférence générale.
Ces violations répétées de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de la République Démocratique du Congo doivent être dénoncées et condamnées avec vigueur par tous les démocrates rwandais et congolais. La gravité de la situation et l’amour de leurs Peuples respectifs devraient les amener à trouver les voies et moyens d’unir leurs forces en vue de rétablir par tous les moyens la paix et la concorde dans la région.
Ces violations répétées de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de la République Démocratique du Congo doivent être dénoncées et condamnées avec vigueur par tous les démocrates rwandais et congolais. La gravité de la situation et l’amour de leurs Peuples respectifs devraient les amener à trouver les voies et moyens d’unir leurs forces en vue de rétablir par tous les moyens la paix et la concorde dans la région.
Dans cette optique, les membres de la communauté internationale, en particulier les membres du Conseil de Sécurité qui soutiennent le régime rwandais, devraient se ressaisir, prendre le taureau par les cornes et aider les peuples de la région à se libérer du joug que leur imposent les criminels qui les dirigent.
En tout état de cause, comme nous allons l’exposer dans les paragraphes qui suivent, il apparait de plus en plus indiscutable que la paix dans la région des grands lacs passe par l’engagement de poursuites, l’arrestation et le jugement du général Paul Kagame, le président rwandais actuel à l’origine de drames humanitaires indescriptibles qui endeuillent son pays et les autres pays de la région jadis bénie des dieux. Le général Kagame est de facto le principal obstacle à la stabilité et à la paix régionale. Son bilan en matière de crimes contre le droit international humanitaire est particulièrement éloquent. Nous n’en rappellerons ici que les principaux :
CRIMES DE PAUL KAGAME SUR LE TERRITOIRE RWANDAIS
- D’octobre 1990 à avril 1994, le FPR dont Kagame était le chef militaire a assassiné plusieurs dizaines de milliers de civils dans le nord du Rwanda, dans les régions de Byumba et de Ruhengeri frontalières avec l’Ouganda. Ces massacres ont été qualifiés de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre par des enquêteurs des Nations Unies (Rapport René Degni-Segui du 12août 1994) et des rapports d’ONG des Droits de l’Homme, classés sans suite ni explication par les autorités de l’ONU.
- Assassinat du président Juvénal Habyarimana : le général Paul Kagame a conçu, planifié, préparé, organisé et mis à exécution l’attentant du 6 Avril 1994 dans lequel les présidents Juvénal Habyarimana du Rwanda et Cyprien Ntaryamira du Burundi, plusieurs membres de leur suite, ainsi que les 3 membres d’équipage français, ont trouvé la mort. Cet attentat terroriste fait l’objet d’une instruction judiciaire en France, et d’innombrables faisceaux de preuves désignent l’actuel président du Rwanda comme le commanditaire de ce crime considéré par tous, y compris par les Nations Unies, comme l’élément déclencheur du génocide tutsi, contrairement aux spéculations d’une certaine presse à la solde du pouvoir de Kigali.
- Entre le 6 avril et le 4 juillet 1994, le général Kagame s’est à maintes reprises vivement opposé à l’arrêt du génocide, allant jusqu’à menacer d’attaquer les troupes internationales – MINUAR et Opération Turquoise confondues – chargées de mettre fin au génocide. Nous en possédons des preuves écrites et audio ainsi que des témoignages d’anciens membres du Haut commandement du FPR.
- Le 5 juin 1994 à Gakurazo, près de Kabgayi dans le centre du pays, Paul Kagame a ordonné l’exécution d’un enfant tutsi de 8 ans, de 4 évêques et de plusieurs religieux hutu et tutsi confondus, décapitant ainsi l’Église catholique du Rwanda.
- Assassinat de citoyens de l’Union Européenne : Une instruction judiciaire est en cours en Espagne, pays dont neuf ressortissants ont été massacrés par l’armée de Paul Kagame, avant et après 1994.
- Entre avril et septembre 1994, les troupes du général Kagame ont semé la terreur dans les territoires conquis par ses troupes, massacrant des dizaines de milliers de civils hutus y compris des vieillards, des femmes et des enfants. Ces atrocités qui se sont poursuivies ont fait l’objet de plusieurs rapports dont celui de Robert Gersony, enquêteur américain en mission pour le compte du HCR. Plusieurs organisations des Droits de l’Homme telles que Human Rights Watch, Amnesty International, ont confirmé les conclusions de ce rapport. Une fois encore, les Nations Unies ont décidé de le retirer de la circulation pour des raisons politiques contraires aux principes du droit international humanitaire.
- Du 21 au 23 avril 1995, les troupes du général Kagame alors Vice-président et ministre de la défense ont massacré plus de 8000 civils hutu regroupés par les Nations Unies dans le camp de Kibeho, dans le sud-ouest du pays. S’il avait eu lieu dans un pays de l’hémisphère nord, le massacre de Kibeho aurait pu, à lui tout seul, constituer un génocide à l’instar de celui de Srebrenica commis un mois plus tard contre 8000 civils bosniaques, dans des conditions et des circonstances étonnamment similaires à celles de Kibeho. La comparaison s’arrête là, car les criminels de Srebrenica ont depuis longtemps été déférés devant la justice internationale, alors que les officiers du FPR qui ont exterminé les 8000 déplacés hutu de Kibeho ont été récompensés et promus à des fonctions de confiance par leur commanditaire, Paul Kagame. Le chef du commando des tueurs de Kibeho, le général tutsi Fred Ibingira, est aujourd’hui un des généraux les plus craints et les plus influents de la galaxie kagameénne.
Jamais deux sans trois, comme à Byumba, à Ruhengeri et à Gakurazo, la communauté internationale a feint de n’avoir rien vu, alors que la Mission des Nations Unies pour l’assistance au Rwanda (MINUAR), des organes de presse indépendants, des organisations humanitaires présentes sur les lieux, tels que la Croix Rouge et Médecins sans frontières, ont largement documenté et confirmé le massacre de Kibeho.
- Entre 1998 et 2003, le général Paul Kagame a ordonné le massacre sélectif de dizaines de milliers de civils hutu accusés d’être de connivence avec des rebelles infiltrés « Abacengezi », et ce dans plusieurs régions du Rwanda : Ruhengeri, Bigogwe, Mahoko, Kanama, Gitarama, Gisenyi, Cyangugu. Des témoins oculaires dignes de foi, rwandais et étrangersn, des organisations internationales comme Human Rights Watch, Amnesty International et plusieurs autres ONG des Droits de l’Homme ont publié des rapports exhaustifs à ce sujet. Mais rien n’y a fait.
Le silence continu et les complicités de certains membres de la communauté internationale face à ces violations répétées du droit international humanitaire ont été interprétés par le gouvernement de Kigali comme un encouragement à poursuivre ses activités criminelles. En atteste le discours prononcé par le président rwandais le 7 avril 2007, dans le village de Murambi au cours d’un meeting public dont nous possédons des copies audio et la retranscription. Dans cette déclaration publique de triste mémoire, le général Paul Kagame a regretté que ses troupes n’aient pas eu le temps ni la capacité militaire de liquider tous les réfugiés hutu ! Il a cependant promis que si l’occasion devait se représenter, il ne « lésinerait pas sur les moyens pour finir le travail ». Parlant des troupes françaises de l’Opération Turquoise, Paul Kagame a ajouté : « Ceux qui étaient ici dans le cadre de l’opération Turquoise sont partis avant que nous ne nous croisions, avant que nous ayons pu les rencontrer. Nous allions nous défouler sur eux de toute notre colère et ils auraient quitté le Rwanda avec un bon cadeau’’.
CRIMES DE GUERRE, CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ ET ACTES DE GÉNOCIDE EN RDC/EX-ZAÏRE
- A partir d’octobre 1996, le général Paul Kagame, alors Vice-président de la République et tout puissant Ministre de la Défense, a planifié, organisé et ordonné l’attaque des camps des réfugiés rwandais installés dans la province du Kivu sous la protection du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR). Au cours de cette invasion, plus de 200 000 civils hutus rwandais et au moins 4 millions de citoyens congolais sont morts massacrés par l’armée du FPR ou soumis par celle-ci à des conditions d’existence ayant provoqué leur mort. Les rapports I et II de Monsieur Robert Garreton, rapporteur spécial sur les droits de l’homme au Zaïre/RDC de 1994 à 2001, corroborés par le récent Rapport Mapping du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), confirment les responsabilités de l’armée de Kagame dans cette hécatombe humanitaire qualifiée par les enquêteurs onusiens d’actes de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Les responsables de ce génocide ont pour noms Paul Kagame et son organisation criminelle, le FPR.
ASSASSINATS POLITIQUES, DISPARITIONS, ATTEINTES AUX DROITS POLITIQUES ET À LA LIBERTÉ D’EXPRESSION
- Assassinats politiques :
Dès la prise du pouvoir par le FPR, le Rwanda est entré dans un cycle d’assassinats politiques et de disparitions sans précédent. La liste qui suit est très partielle et loin d’être exhaustive.
Le 5 mars 1998, M. Seth Sendashonga, ancien ministre FPR de l’Intérieur, fut abattu en plein jour à Nairobi, au Kenya; L’auteur de cet assassinat, Francis Mugabo, était diplomate à l’Ambassade du Rwanda dans la capitale kenyane. De commun accord, les gouvernements rwandais et kenyan décidèrent de le rapatrier en invoquant son immunité diplomatique.
Le 6 octobre 1996, l’ancien colonel des FAR et du FPR, M. Théoneste Lizinde fut assassiné à Nairobi en compagnie de l’homme d’affaires Augustin Bugirimfura.
M. Pasteur Musabe, ancien Directeur Général de la Banque Continentale Africaine au Rwanda (BACAR), fut tué à Yaoundé au Cameroun dans la nuit du 14 au 15 février 1999.
M. Vincent Nsanzabaganwa, ancien président du Conseil d’Etat, assassiné le 14 février 1997.
M. Assiel Kabera, ancien conseiller à la Présidence de la République, abattu le 5 mars 2000.
M. le député Léonard Hitimana, assassiné le 7 avril 2003.
Le Colonel Augustin Cyiza, kidnappé et tué le 23 avril 2003 par la police secrète de Kagame.
M. Edouard Mutsinzi, ancien Rédacteur-en-chef du journal Le Messager à Kigali kidnappé, et passé à tabac. Il s’en sortit les côtes brisées, les yeux arrachés et son cerveau sérieusement endommagé. Il mène une vie végétative en Belgique.
M. André Kagwa Rwisereka, premier vice-président du Parti démocratique des Verts, assassiné par un escadron de la police de Kagame, le 13 juillet 2010 dans la ville de Butare.
Le 6 octobre 1996, l’ancien colonel des FAR et du FPR, M. Théoneste Lizinde fut assassiné à Nairobi en compagnie de l’homme d’affaires Augustin Bugirimfura.
M. Pasteur Musabe, ancien Directeur Général de la Banque Continentale Africaine au Rwanda (BACAR), fut tué à Yaoundé au Cameroun dans la nuit du 14 au 15 février 1999.
M. Vincent Nsanzabaganwa, ancien président du Conseil d’Etat, assassiné le 14 février 1997.
M. Assiel Kabera, ancien conseiller à la Présidence de la République, abattu le 5 mars 2000.
M. le député Léonard Hitimana, assassiné le 7 avril 2003.
Le Colonel Augustin Cyiza, kidnappé et tué le 23 avril 2003 par la police secrète de Kagame.
M. Edouard Mutsinzi, ancien Rédacteur-en-chef du journal Le Messager à Kigali kidnappé, et passé à tabac. Il s’en sortit les côtes brisées, les yeux arrachés et son cerveau sérieusement endommagé. Il mène une vie végétative en Belgique.
M. André Kagwa Rwisereka, premier vice-président du Parti démocratique des Verts, assassiné par un escadron de la police de Kagame, le 13 juillet 2010 dans la ville de Butare.
Plus proche de nous en février 2010, moins de 48 heures après la visite du président Nicolas Sarkozy au Rwanda, Paul Kagame a lancé une purge sans merci visant des journalistes, des personnalités politiques et militaires, y compris au sein de son parti, le FPR, obligeant certains de ses membres de premier plan à fuir le pays pour échapper à la mort. Le cas le plus connu est celui du Général tutsi Kayumba Nyamwasa, ancien numéro deux de l’armée du FPR réfugié en Afrique du Sud en février 2010. Poursuivi par un escadron de tueurs envoyés par le régime, comme l’ont confirmé des sources policières et judiciaires sud africaines, le général Kayumba a frôlé la mort, après avoir été blessé par balles. Plusieurs autres opposants politiques et journalistes ont été jetés en prison ou assassinés par la police présidentielle avec une sauvagerie inimaginable.
Arrestation d’opposants politiques:
Parmi les dirigeants de l’opposition détenus arbitrairement par le régime rwandais, il convient de citer Mme Victoire Ingabire, présidente des FDU-Inkingi, Maître Bernard Ntaganda, président du PS Imberakuri, M. Déo Mushayidi, président du PDP-Imanzi, M. Théoneste Niyitegeka, condamné à 15 ans pour avoir osé défier Paul Kagame lors des élections présidentielles de 2003.
Un autre phénomène criminel dont on parle rarement au Rwanda, compte tenu de son caractère secret et insidieux, est la disparition des personnes. Des milliers de jeunes hutu ou des opposants hutu et tutsi disparaissent chaque année au Rwanda, dans le silence le plus total de parents tétanisés par la peur d’être tués à leur tour. Tout le monde le sait, mais la difficulté d’en apporter les preuves et la peur qu’inspire le régime, contribuent à conforter l’omerta sur ces disparitions.
QUEL RÔLE PEUT JOUER LA FRANCE ?
ET LES AUTRES MEMBRES DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ?
ET LES AUTRES MEMBRES DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ?
La France fut, l’on s’en souvient, une des rares puissances occidentales à avoir perçu à temps l’ampleur du génocide de 1994, et à avoir, certes avec deux mois de retard, porté assistance aux populations rwandaises à travers l’Opération Turquoise, sauvant ainsi de la mort des centaines de milliers sinon des millions de rwandais, toutes ethnies confondues, réfugiés dans la Zone Humanitaire Protégée (ZHP) entre le 22 juin et le 21 août 1994, au moment où plusieurs membres importants du Conseil de sécurité de l’ONU ne voulaient même pas en entendre parler.
Au lendemain du génocide de 1994, le nouveau gouvernement rwandais dominé par le FPR a logiquement bénéficié d’un état de grâce et d’une grande bienveillance complaisante, voire coupable, de la part de la communauté internationale. Malgré les nombreux crimes repris dans les rapports de l’ONU, des pays comme les États-Unis d’Amérique, la Grande Bretagne, la Belgique, la RFA, ont continuellement fermé les yeux devant les atrocités perpétrées en toute impunité par le Front Patriotique Rwandais qui instrumentalise le génocide des Tutsi pour justifier ses propres crimes.
En février 2010, le Président Nicolas Sarkozy a effectué une visite éclair à Kigali, voyage au cours duquel il a déclaré que la France avait commis des erreurs d’appréciation dans sa gestion passée de la crise rwandaise. Cette déclaration a, semble-t-il, réussi à apaiser les tensions entre les deux pays amis. C’est dans ce contexte que le dictateur rwandais a effectué une visite controversée et inopportune à Paris du 11 au 13 septembre 2011. Tout en en prenant acte, nous sommes d’avis que la normalisation diplomatique en cours ne doit pas servir de caution au régime criminel de Paul Kagame, ni avoir pour conséquence de blanchir ses crimes ou d’assurer son impunité au regard de ses violations répétées du droit international humanitaire. En tout état de cause, cette normalisation ne devrait pas avoir pour résultat de redorer le blason d’un chef d’état criminel, au moment où des milliers de rwandais, y compris parmi ses plus proches collaborateurs, fuient la terreur de son régime. Le blanc-seing longtemps accordé à Paul Kagame a en effet très largement contribué aux malheurs et aux souffrances de nos peuples. Il est temps que cette situation injuste et inacceptable prenne fin.
Si la Démocratie et les droits de l’homme constituent l’alpha et l’oméga des libertés dans les grands pays démocratiques, ils ne doivent pas être considérés comme un luxe pour les populations de pays comme le Rwanda et la RDC victimes du plus grand génocide de l’histoire du contient africain.
Nous lançons donc un appel à toutes les personnes éprises de paix et de liberté, aux défenseurs et aux organisations des droits de l’homme, aux partis politiques et à la société civile de la région des grands lacs, afin qu’ils redoublent de vigilance et unissent leurs forces pour amener les pays membres du Conseil de Sécurité à inscrire l’examen du Rapport Mapping du 1er octobre 2010 à l’ordre du jour de leur prochaine session.A cette occasion, le Conseil de Sécurité devrait adopter une résolution créant et fixant les modalités de fonctionnement du Tribunal international ad hoc chargé de poursuivre et de juger les auteurs présumés des crimes intolérables dénoncés dans ledit rapport. Il reviendrait ensuite à cette juridiction de lancer les mandats d’arrêt contre les criminels présumés, quelles que soient leurs fonctions officielles actuelles.
En particulier, la France peut et doit contribuer à l’éradication de l’impunité et au respect du droit international humanitaire dans cette région. Ce pays qui assure actuellement la présidence du Conseil de Sécurité devrait prendre une initiative diplomatique immédiate à cet égard. Ne pas le faire serait trahir le rôle historique que ce pays a toujours joué au sein de la communauté internationale. Son inaction éventuelle contribuerait de fait à pérenniser les souffrances des victimes rwandaises et congolaises. En revanche, parrainer une résolution du Conseil de sécurité sur le Rapport Mapping serait pour la France la manière la plus significative d’aider les pays de la région à bâtir une paix durable et à mettre un terme à l’impunité dont bénéficient scandaleusement les responsables de la mort de millions d’être humains au Rwanda et en République Démocratique du Congo. La jurisprudence de la CPI dans les cas soudanais et libyen pourrait inspirer cette démarche conforme au droit international.
L’Organisation des Nations Unies, en particulier les membres permanents du Conseil de sécurité, ne devraient pas participer au sauvetage d’un dictateur sanguinaire en fin de carrière. Continuer à pactiser avec le régime criminel de Paul Kagame est une faute grave préjudiciable à la morale internationale et aux intérêts actuels et futurs des peuples de la région des grands lacs. Après avoir significativement œuvré au retour de la paix et de la liberté en Côte d’Ivoire, en Libye, en Afghanistan et dans d’autres parties du monde, la Communauté internationale doit contribuer à la réconciliation et non au renforcement des pouvoirs autocratiques et oppresseurs, prédateurs des droits de l’homme et des ressources naturelles de la région des grands lacs.
Pour toutes les raisons qui précèdent, nous pensons comme de nombreux observateurs de la politique africaine, que la paix dans les pays des grands lacs passe par l’arrestation et le jugement du président rwandais actuel, le général Paul Kagame et ses complices responsables de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crimes de génocide. Et que Justice soit faite.
Fait à Paris le 20 août 2012
Ambassadeur Jean-Marie Vianney Ndagijimana*
Ancien Ministre des Affaires étrangères
Ancien Ministre des Affaires étrangères
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